COLOMBIE – De la marijuana plus chère que la coca

Dernière mise à jour le 26/07/2016

La Colombie est connu pour sa coca mais on y cultive aussi une variété renommée de cannabis…

Source : http://www.courrierint.com/article.asp?obj_id=87889
Date : 24-07-2008

Dans le sud du pays, la culture du cannabis
repart grâce à une nouvelle variété très
puissante et non génétiquement modifiée.

La commune de Corinto, dans le département du
Cauca [sud-ouest], a toujours été l’un des
principaux centres de production de marijuana en
Colombie. Il y a quelques mois, il se disait
qu’on y produisait une marijuana d’excellente
qualité appelée la cominera, d’une grande valeur
sur le marché, à laquelle n’avaient goûté que
quelques privilégiés. Nous avons décidé de nous
rendre sur place afin de vérifier si la rumeur
était fondée. 

Dans cette région, on se prend à rêver au retour
de l’âge d’or de la marijuana, dans les années
1970. Et il y a de quoi : alors que les
trafiquants achètent 85 000 pesos [30 euros] la
tonne de feuilles de coca à la sortie de la
plantation, la tonne de cominera, elle, se paie
180 000 pesos [65 euros]. Et, sur l’île de San
Andrés [archipel colombien au large du Nicaragua,
dans les Caraïbes], point de départ de cette
substance vers le monde entier, son prix atteint
déjà les 365 euros.

Corinto a été marqué par l’âge d’or de la
marijuana et par son déclin. Sur toutes les
parcelles, café, banane et manioc côtoient des
cultures illicites. Les familles de paysans ne
vivent pas uniquement de ces dernières, mais
elles les conservent par nécessité. Car, pour
vendre les cultures légales, il faut parcourir
des dizaines de kilomètres, tandis que la coca et
la marijuana sont achetées par les trafiquants
sur les lieux mêmes de production. Sur les routes
menant à ces villages isolés, la présence des
autorités est pratiquement nulle. A chaque détour
du chemin, les guérilleros du 6e front des FARC
surveillent ceux qui osent s’aventurer sur "leur"
territoire et suivent à moto ceux qui continuent
leur route sans leur autorisation.

Au coeur de la zone, nous avons prélevé dix
échantillons différents de plants de marijuana,
certains déjà prêts à la distribution, d’autres
pas encore récoltés, pour les faire analyser par
des experts de la lutte antidrogue. Ces
échantillons sont passés par l’aéroport de
Popayán [capitale du département du Cauca] au nez
et à la barbe des autorités.

Les analyses effectuées dans des laboratoires
officiels montrent que certains échantillons
présentent une teneur en tétrahydrocannabinol
[THC, le principe actif du cannabis] proche de 18
%. Il s’agit de plantes agronomiquement
améliorées. L’ensemencement a été optimisé et
plusieurs variétés ont été croisées de façon à
obtenir une plante qui, sans manipulations
génétiques, présente une teneur en THC très
élevée, comparable uniquement à celle des graines
développées dans les laboratoires européens.
Cette nouvelle variété présente par rapport aux
semences génétiquement modifiées l’avantage de
pouvoir se reproduire.

D’après les cultivateurs, plusieurs types de
semences sont arrivées dans la région et ont été
remplacées progressivement en fonction de leur
productivité. Ils ont ainsi successivement
cultivé une variété appelée caturra, puis la F1,
la mango biche et l’hawaiienne, améliorant ainsi
la qualité à chaque récolte. Les paysans, qui
passent cinq mois par an dans les champs de
marijuana, n’ont toutefois aucune idée du
potentiel hallucinogène de leur produit.
L’objectif des narcotrafiquants est d’obtenir un
maximum de rentabilité avec un minimum
d’investissement : à Corinto, on teste nouvelles
variétés, méthodes d’irrigation, croisements
innovants et nouveaux fongicides.

D’après un rapport du Réseau interaméricain pour
la prévention de l’usage de drogues et de Drug
Free America, deux organisations de lutte contre
les stupéfiants, la puissance de la marijuana n’a
cessé d’augmenter ces vingt dernières années
partout dans le monde [voir CI n° 868, du 21 juin
2007]. Ainsi, la teneur moyenne en THC de la
marijuana vendue aux consommateurs est passée de
2 % à la fin des années 1970 et au début des
années 1980 à 6,07 % en 2000. Il n’existe aucun
recensement précis des cultures de marijuana,
mais, selon la police antidrogue, la Colombie
recèle un peu plus de 500 hectares semés de
marijuana. Une chose est sûre : la productivité
s’est améliorée, et on produit désormais sur ces
500 hectares bien plus de marijuana, d’une
qualité toujours meilleure.

 

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