Les jeunes, l’alcool et le marketing.

Dernière mise à jour le 26/07/2016

Des méthodes de vente d’alcool auprès des jeunes de plus en plus accrocheuses…

Source : Revue de presse de la MILDT du 31/01/2006

 

60 MILLIONS DE CONSOMMATEURS publie un long dossier sur « l’alcool et les jeunes ». D’après le mensuel « les
jeunes sont la cible de choix des fabricants d’alcool. Les nouvelles
boissons sont conçues pour séduire un public de plus en plus jeune et
féminin » et « Parrainant les fêtes, les alcooliers déploient toutes
leurs armes marketing pour accroître leur clientèle. Au mépris de la
loi »
.
Le journal qui souligne le goût des jeunes pour la
vodka, rapporte que selon le site internet de la Fédération française
des spiritueux, les ventes de cet alcool ont augmenté de 10% et que « les jeunes disent yes aux YAS »
(young adult spirit, ou spiritueux pour jeunes adultes). Affirmant que
les jeunes français sont devenus adeptes du « binge drinking » c’est à
dire de boire très rapidement assez d’alcool pour trouver l’ivresse, le
journal précise que selon le rapport sur l’alcoolisme d’Hervé Chabalier
ils consomment aussi du cannabis au cours de ces soirées, « un des facteurs d’aggravation du risque accidentel des jeunes ».
Le magazine qui note que des « prémix », très sucrés pour cacher le
goût de l’alcool, ont également été inventés pour séduire les jeunes,
observe aussi que des bières allégées et aromatisées ont été créées à
destination des filles avec cette précision que les alcooliers qui
jouent en permanence sur l’attrait des jeunes pour la nouveauté « ne
lésinent pas pour mettre leurs produits à disposition par le biais
d’animations ou de partenariats … pourtant interdits ! ».

A noter un point sur « toutes ces boissons qui ciblent les jeunes ».
Evoquant les prémix avec un goût sucré, une présentation en canette et
des prix bas qui en « faisaient des boissons faciles à boire », et dont
les ventes ont plus que doublé entre 1995 et 1996, le journal rappelle
qu’un amendement a été adopté fin 1996 pour instaurer une taxe les
concernant. Soulignant que cette « levée de boucliers a fait battre en
retraite les alcooliers et les distributeurs », le mensuel note que
deux ans plus tard le dispositif, jugé discriminatoire par le conseil
d’Etat et la commission européenne, a été modifié avec une taxe
maintenue mais une révision de la définition des boissons aux quelles
la taxe s’appliquait. Le magazine qui indique qu’ensuite ce sont les
bières fortes qui ont été visées par un amendement augmentant la
taxation, précise que le gouvernement a toutefois reculé risquant
d’être accusé de protectionnisme. Evoquant enfin les « malternatives »
boissons à base de malt qui sont apparues dans les supermarchés en
2003, le journal souligne que selon un responsable du groupe Auchan « ces produits ont réalisé un décollage faramineux »
ce qui a incité à l’adoption d’une nouvelle taxe entrée en vigueur en
janvier 2005 et qui « semble avoir été efficace ». Observant que la
chute des ventes a été de 40% mais que pour y échapper les alcooliers
ont revu leur recette avec les « vinipop », à base de vin aromatisé, le
journal souligne qu’ainsi on trouve des boissons dont les teneurs en
sucre dépassent les 35 grammes/litre mais qui ne sont pas taxées
puisque le vin est exclu de la taxe.

En encart le député
Yves Bur, à l’origine de l’adoption de la taxe sur les cocktails à base
d’alcool, observe que les volumes de vente sont en baisse de 40% sur
les six derniers mois
mais qu’il faut rester vigilant car les alcooliers « continueront leurs actions marketing » avec de « 
nouvelles formules de boissons (…) élaborées pour contourner la
législation et séduire un jeune public, notamment en utilisant une base
de vin
 ». Et il avertit « je travaille dès à présent aux adaptations législatives qui s’avèreraient nécessaires  ».

A noter, une analyse de 16 prémix, dont pour certains le degré d’alcool peut dépasser 7°,
et dont la « composition curieuse mélange faux sucre, arômes, colorants
et acidifiants », mais aussi l’analyse de 14 bières titrant de 7 à 14°
et qui « dans le cadre d’une consommation de « défonce » (…) sont
devenues une boisson de prédilection des garçons buveurs réguliers ».

« Les alcooliers font la fête » titre également le magazine qui relève que « soirées étudiantes, Open bar, concerts, galas de grandes écoles » sont « un vivier pour les fabricants d’alcool
qui profitent de toutes les fêtes prisées par les jeunes pour se
constituer une clientèle d’avenir » avec un « marketing insidieux (qui)
vise à faire passer de l’initiation à la dépendance ». Evocation d’une
soirée Open bar au Batofar à Paris où l’entrée est à 20 euros. Un jeune
homme en bac pro à Cergy, qui vient de vider son dixième cocktail,
explique rechercher ces soirées « car elle sont très rentables ».
Commentaire du mensuel « au tarif habituel, il serait déjà délesté de
80 euros ». Affirmant que ce concept répond à un nouveau type de
consommation : "la défonce", le magazine explique qu’il ne s’agit pas
d’un « phénomène marginal mais d’une réalité structurelle » car
« l’alcool avec le soutien des alcooliers est omniprésent dans
l’univers des jeunes ». Le journal qui mentionne les opérations dans
les discothèques avec des alcools à prix réduits, évoque aussi les
opérations promotionnelles avec parkas aux couleurs de la marque
offerts aux clients et gogo danseuses. Indiquant que, les étudiants
sont une cible de choix, 60 millions de consommateurs fait état des
pratiques en cours dans une école de commerce de Tours où le bureau des
élèves entretient de « bonnes relations « commerciales » (…) avec les
alcooliers » afin d’organiser Open bar, soirées d’intégration, journées
d’élections au bureau des élèves. Pourtant, affirme la revue, « la loi
est claire «  toute opération de parrainage est interdite
lorsqu’elle a pour objet la propagande directe ou indirecte en faveur
des boissons alcoolisées
 » et le ministère de la santé explique pour sa part « par conséquent (…) les opérations des alcooliers dans les fêtes étudiantes (…) sont interdites par la loi ».
Assurant, que du côté des alcooliers « la langue de bois est de
rigueur », le magazine cite la responsable de la communication
d’Heineken : il arrive au groupe « de participer à certaines
manifestations (…) mais nous ne sommes jamais partenaires de soirées
Open bar et nous demandons toujours que soient disposées des affiches
Entreprise et Prévention prônant la modération. Par ailleurs la cible
jeune n’est pas notre priorité
 ». D’après le mensuel, ces propos sont en « totale contradiction » avec ceux du directeur du Batofar « Sur
ce type de soirée nous faisons appel à nos partenaires habituels pour
nous aider en terme de produits, en échange d’une visibilité
publicitaire. Pour la soirée Open bar une bouteille de Desperados sur
trois était offerte par Heineken
 ». Evoquant les logos d’autres
marques visibles dans la soirée et commercialisées par Pernod Ricard,
le journal souligne qu’au groupe il a été affirmé que ce choix relevait
de l’organisateur, lequel était « catégorique » « Pernod Ricard était aussi partenaire de la soirée, une bouteille sur trois environ étant prise en charge par l’alcoolier ».
D’après la revue, tous les alcooliers « clament leur adhésion à
l’association Entreprise et Prévention » qui regroupe les principales
entreprises du secteur et « se contente essentiellement d’envoyer des
kits sur le thème de la modération et de l’alcool au volant ». Un
responsable de l’association Avenir et santé affirme «  les alcooliers ont compris l’impact du discours de prévention concernant les accidents de la route en termes de communication »
ce qui pour le journal signifie « faire baisser les chiffres des
accidents : oui, faire baisser la consommation : non ». Conclusion sur
les écoles qui ont banni le partenariat avec les alcooliers et interdit
les soirées Open bar, sachant que selon une étude « seules 6% des
écoles interrogées ont décrété la suppression du soutien financier des
alcooliers ».

Un article aussi sur « les dégâts de la
défonce » sachant que l’alcool accroît considérablement les accidents
de la route d’autant qu’il est souvent associé au cannabis et qu’il
« multiplie aussi les actes violents avec les conséquences sociales que
cela entraîne »
. Un point sur la campagne « celui qui conduit c’est celui qui ne boit pas  » prolongée par celle qui met en scène un conducteur baptisé «  Sam  »
par la sécurité routière. Rappelant que les accidents de la route sont
la première cause de mortalité des 18-24 ans qui représentent 21% des
tués et 9% de la population, le magazine développe les chiffres des
accidents provoqués par l’alcool, pour préciser que deux autres
caractéristiques augmentent le risque d’accidents, le fait que les
jeunes boivent souvent dans plusieurs endroits, ce qui implique des
déplacements, mais aussi le fait qu’ils consomment du cannabis dans ces
soirées puisque seuls 17% des jeunes sont abstinents des deux produits,
sachant que selon une étude publiée au British Medical Journal
« la consommation de cannabis constitue un vrai facteur de risque avec
un effet dose significatif » même si le risque d’accident mortel est
« significativement inférieur à (celui) associé à une alcoolémie
positive ». Pourtant, selon le magazine, « il n’y a pas que les
accidents de la route » et on sait même que certains jeunes « peuvent
se laisser aller, au point paraît-il d’utiliser les éthylotests pour
faire des concours ». 60 Millions de consommateurs qui relève que le Dr
Craplet est critique envers « l’approche restreinte » du conducteur
désigné, précise que pour lui on ne peut pas se contenter d’une
politique de réduction du risque routier car l’alcool est aussi
retrouvé dans «  les situations telles que bagarres ou rapports sexuels non désirés » sachant de plus que la consommation d’alcool peut également conduire à l’alcoolisme.

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