Savoir plus ? risquer moins, ou l’obscurantisme du gouvernement conservateur du Canada

Dernière mise à jour le 18/07/2016

La révolution conservatrice dans le champs des drogues touche aussi le Canada…

Source : http://txsubstitution.blogspot.com/2008/04/drogues-savoir-plus-risquer-moins-ou.html
Date : 21/04/2008

Il y a quelques années, était publié en France un livre
d’information sur les drogues, leurs effets et les risques pouvant
découler de leurs usages : « Drogues : Savoir plus – risquer moins ».
Cet
ouvrage d’information, publié par la Mission interministérielle de
lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) était destiné à
fournir au grand public une information fiable, basée sur l’évidence
scientifique.
En partant du principe que les
individus sont en mesure de gérer leur propre santé, dès lors qu’ils
bénéficient des informations requises pour le faire, et que la
prévention de l’usage de drogue problématique passe, entre autres, par
une information objective et équilibrée; cette initiative visait à
responsabiliser, à permettre de faire des choix éclairés et à réduire
les risques et les méfaits.
Cet ouvrage étant reconnu pour sa
pertinence et sa qualité, en 2001, le Comité permanent de lutte à la
toxicomanie (CPLT) décidait d’en adapter le contenu au contexte
québécois et procédait, par la suite, à l’édition d’une version
anglophone ainsi qu’à une mise à jour des informations. Après la
dissolution du CPLT par le gouvernement Charest, le Centre québécois de
lutte aux dépendances (CQLD) publiait la troisième édition de l’ouvrage.
C’est
ainsi que, distribué à plus de 200 000 exemplaires, « Drogues : Savoir
plus ? risquer moins » est devenue une référence incontournable au
Québec, en matière d’information et de prévention de l’usage
problématique de stupéfiants, tant pour les professionnels que pour le
grand public.

Ainsi, l’ancien gouvernement fédéral, d’allégeance
libérale, commandait quelque 500 000 exemplaires du bouquin, destinés à
être distribués gratuitement aux jeunes canadiens. À 2 $ l’unité, la
facture se montait à 1 million de dollars canadiens.

Radio-Canada nous apprenait hier que
le gouvernement conservateur de Stephen Harper, avait, malgré le
montant de la facture, décidé de ne pas distribuer les 500 000
exemplaires qui sont stockés depuis un an déjà. Le gouvernement juge en
effet le contenu de l’ouvrage, pourtant basé sur des faits
scientifiques, trop ambiguë (il décrit entre autres les sensations
agréables que peuvent procurer certaines drogues) et nuancé (il ne met
pas assez l’accent sur les dangers de la consommation et la nécessité
de ne pas consommer ou d’arrêter de consommer).

Quand, en tant
que citoyen, on sait que le gouvernement conservateur a fait de la
prévention l’un des piliers de sa nouvelle stratégie antidrogue et que,
dans un même temps, celui-ci décide de mettre sur les tablettes un
ouvrage pour la simple raison que celui-ci ne présente pas uniquement,
à grand renfort de messages inspirant la peur, les effets délétères des
usages de drogues; on est en droit de se demander si nos taxes sont
judicieusement utilisées.

Ce n’est en effet pas la première fois
que le gouvernement conservateur de Stephen Harper démontre au grand
jour qu’en matière de drogue, entre autres, il privilégie une approche
idéologique, basée sur des principes moraux, plutôt que sur l’évidence
scientifique, aussi criante soit-elle.
Aussi,
malgré tous les résultats remarquables que pourront donner les études
scientifiques je crois qu’il ne faudra pas s’étonner de voir notre
gouvernement progresser à grands pas dans le démantèlement méthodique
de la politique de réduction des méfaits qui était celle du Canada en
matière de drogue.

La non-diffusion de « Drogues : Savoir plus –
risquer moins », qui, entendons-nous, est une forme de censure, ce qui
est un comble pour un gouvernement qui se targue de vouloir être
transparent, nous laisse en effet clairement entrevoir le sort qui sera
ultimement réservé aux projets de site d’injection supervisé et de
traitement avec prescription d’héroïne que nous tentons de défendre
avec des arguments scientifiques.
Mais au-delà de ça, que doit-on craindre?
Interdira-t-on
la distribution gratuite de seringues afin de ne pas inciter, par ce
biais, à l’usage de drogues par voie intraveineuse?

Préférera-t-on
aux traitements de substitution, l’une des interventions médicales dont
l’efficacité est la mieux documentée, des stratégies de soin ayant pour
objectif l’abstinence pour tous, même si tout porte à croire que cela
est impossible?

Compte tenu du faible poids politique qu’ont
actuellement, les associations d’usagers de drogues et les
professionnels en toxicomanie, que peut-on faire pour que le Canada
revienne à un politique pragmatique en matière de drogue? N’avons-nous
plus qu’à espérer que les dérives conservatrices, qui, de moins en
moins subtilement, tentent d’indiquer aux canadiens la voie morale
qu’ils doivent suivre, finissent par inciter la majorité de l’électorat
à s’engager sur une voir plus progressiste?

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