Vers une interdiction de la vente d’alcool aux moins de 18 ans

Dernière mise à jour le 26/07/2016

Une future loi pour interdire la vente de l’alcool aux moins de 18 ans au lieu de 16 ans…

Source :http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-3232,50-1048243,0.html

Date : 22/05/2008

Le gouvernement s’achemine vers l’interdiction de la
vente d’alcool à tous les mineurs de moins de 18 ans. Alors que la
Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie
(MILDT) doit achever, vendredi 23 mai, la concertation qu’elle a
engagée sur les moyens de lutter contre l’alcoolisation excessive des
jeunes, un consensus se fait jour, parmi les professionnels concernés,
sur la nécessité d’augmenter de 16 à 18 ans le seuil d’interdiction de
la vente d’alcool aux mineurs. La mesure, approuvée par la ministre de
la santé, Roselyne Bachelot, pourrait être introduite dans le projet de
loi sur l’organisation des soins, qui sera débattu à l’automne.

Les pouvoirs publics cherchent à endiguer les
consommations excessives d’alcool chez les jeunes, en forte
progression. Le "binge drinking", phénomène anglo-saxon qui consiste à
être saoul le plus vite possible, se développe en France, même s’il
reste moins fréquent que dans la plupart des pays européens.

Instaurées
en 1914, les mesures de protection des mineurs face à l’alcool, qui
interdisent notamment de vendre aux moins de 16 ans, ne sont pas
respectées. "Aujourd’hui, il est courant de voir des jeunes de 14
ans acheter de grandes quantités d’alcool, à bas prix, dans les
supermarchés
, déplore Daniel Mach, député (UMP,
Pyrénées-Atlantique), qui a déposé une proposition de loi pour
interdire la vente à tous les mineurs. Dans mon département, on a récemment retrouvé un jeune dans les toilettes d’un supermarché, en coma éthylique."

L’extension
de l’interdiction de vente d’alcool à tous les mineurs est désormais
approuvée par une majorité des professionnels du secteur alcoolier.
Consultés par la MILDT sur ce sujet, la Fédération française des
spiritueux, la Fédération des entreprises du commerce et de la
distribution (FCD), qui représente les hypermarchés, et l’association
Entreprise et prévention, qui regroupe les grandes marques d’alcool,
s’y sont ralliés. "L’interdiction de la vente à tous les jeunes de moins de 18 ans a ceci d’intéressant qu’elle frappe les esprits, analyse Alain Rigaud, président de l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (Anpaa). C’est une mesure symbolique qui dit "attention danger" et débanalise l’alcool, tout en compliquant l’accès au produit."

Reste
à rendre effective une telle disposition. Faut-il que les caissières de
supermarchés demandent leurs papiers d’identité aux consommateurs,
comme c’est le cas à l’étranger ? Faut-il habiliter les vigiles aux
contrôles d’identité, après l’acte d’achat, comme le réclame la FCD ?
Les modalités ne sont pas encore tranchées. "Nous souhaitons clarifier les obligations des professionnels et leur donner les moyens de contrôle, explique Etienne Apaire, président de la MILDT. L’interdiction n’aura de sens que si elle est vraiment appliquée."

D’autres
mesures sont à l’étude. La MILDT a soumis aux professionnels l’idée
d’interdire les "happy hours" (vente d’alcool à prix cassés dans les
cafés), les "open bars" (mise à disposition gratuite d’alcool) et la
vente d’alcool fort à la bouteille dans les discothèques. Elle
envisage, par ailleurs, d’augmenter la taxation des boissons
alcoolisées, qui n’a pas bougé depuis 8 ans pour les bières et 20 ans
pour le vin. Enfin, constatant que les jeunes s’alcoolisent de plus en
plus en groupe, dans les parcs ou sur les parkings, la MILDT étudie une
interdiction de la consommation sur la voie publique, comme aux
Etats-Unis.

Avant même d’être soumises à l’arbitrage du

gouvernement, ces mesures suscitent de fortes réserves. L’Union des
métiers et industries de l’hôtellerie (UMIH), qui représente cafés,
restaurants et discothèques, estime qu’après l’interdiction de fumer
dans les lieux publics, elle sert de "bouc émissaire". De leur côté, les spécialistes de la santé publique soulignent les limites d’une politique exclusivement prohibitive. "Cet arsenal répressif ne servira à rien si on ne s’interroge pas sur les causes de l’alcoolisation excessive des jeunes, souligne Philippe Batel, psychiatre alcoologue. Il
faut mettre autant d’énergie dans des actions de prévention, sinon il y
aura des contre-effets : les jeunes continueront à s’alcooliser, mais à
l’abri des regards."
"Il n’y a pas d’égalité des jeunes dans
l’accès à l’information sur les dangers de l’alcool, étant donné la
faiblesse des dispositifs de prévention
, dénonce Alain Rigaud. C’est tout le champ de l’éducation à la santé qui est en souffrance."


Références

RÉGLEMENTATION.
L’alcool est interdit à la vente aux moins de 16 ans, dans les débits
de boisson, les commerces et les lieux publics. De 16 à 18 ans, les
mineurs peuvent se voir vendre des boissons alcooliques du 2nd groupe (vins, bières, cidres…).

Le
code de la santé publique interdit aux débitants de boissons
alcoolisées d’accueillir des mineurs de moins de 16 ans non accompagnés
par un adulte.

CONSOMMATION. Chez les moins de 17
ans, les ivresses sont en hausse. 26 % des adolescents ont été ivres au
moins trois fois en 2005, contre 20 % en 2003 ; 9,7 % d’entre eux l’ont
été au moins dix fois en 2005, contre 6,4 % en 2003. Parmi les
scolarisés de 15 ans, un garçon sur cinq, une fille sur huit ont
déclaré une ivresse au cours du dernier mois.

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