Publication de l’ouvrage Cannabis, données essentielles de l’OFDT

Dernière mise à jour le 18/07/2016

L’OFDT consacre une monographie du produit illicite le plus consommé en France…

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3224,36-933875@51-933960,0.html 
Le profil type des fumeurs de cannabis :

http://www.lemonde.fr/web/infog/0,47-0@2-3224,54-934006@51-933960,0.html 
Les Français et le cannabis (vidéo) :

http://www.lemonde.fr/web/video/0,47-0,54-934008,0.html 

Sandrine Blanchard
Article paru dans l’édition du 11.07.07

 
C’est la "bible" du cannabis. Diffusé à compter
de mardi 10 juillet, l’ouvrage Cannabis, données
essentielles constitue la première monographie
réalisée par l’Observatoire français des drogues
et des toxicomanies (OFDT) sur la substance
illicite la plus répandue en France. Tous les
résultats des études, enquêtes et données
épidémiologiques, scientifiques ou sociologiques
les plus récentes, et parfois inédites, sont ici
synthétisés pour livrer un tableau au plus proche
de la réalité du cannabis sur le territoire. On
le sait, le "joint" s’est largement banalisé. Il
compte près de quatre millions de consommateurs,
dont 1,2 million d’usagers réguliers et 550 000
usagers quotidiens.

Ces chiffres placent la France parmi les pays les
plus consommateurs en Europe, aux côtés de la
République tchèque, de l’Espagne et du
Royaume-Uni. Chez les jeunes, toutes catégories
sociales confondues, l’expérimentation du
cannabis est devenue un "modèle dominant",
souligne Jean-Michel Costes, directeur de l’OFDT.
Depuis 2000, son usage régulier atteint presque
le même niveau que celui de l’alcool. En 2005,
49,5 % des jeunes âgés de 17 ans ont déclaré
avoir déjà pris du cannabis au cours de leur vie,
27,9 % au cours des trente derniers jours, 10,8 %
de façon régulière et 5,2 % quotidiennement.

En hausse très nette depuis le début des années
1990, l’expérimentation est également devenue
plus précoce. C’est en moyenne vers 15 ans qu’on
fume son premier joint. Ensuite, l’usage du
cannabis est davantage lié à "l’intensité de la
sociabilité et des contacts amicaux" qu’au milieu
social ou au parcours scolaire. Ainsi, l’usager
de cannabis est d’abord un "fêtard". Plus le
nombre de sorties – au café, dans les pubs ou
chez des amis – est fréquent, plus la
consommation augmente.

Si l’expérimentation du cannabis n’a cessé de se
répandre, le mouvement semble néanmoins se
stabiliser depuis 2002. En revanche, la part de
consommateurs réguliers (au moins dix fois par
mois) parmi les 15-34 ans est passée de 3,8 % en
2000 à 5,9 % en 2005 et apparaît en lien direct
avec la situation scolaire ou professionnelle.
Schématiquement, l’usage "festif" se retrouve
davantage parmi les jeunes issus de milieux
favorisés ayant un bon niveau scolaire. En
revanche, on rencontre plus souvent l’usager
régulier chez les jeunes en difficulté ou en
échec scolaire et les chômeurs. "Un meilleur
niveau d’instruction autorise l’expérimentation
et ne freine pas l’usager mais "protégerait" du
basculement vers une consommation régulière et un
usage problématique", notent les spécialistes.

Ce tableau cache quelques surprises. Ainsi, les
cadres s’avèrent plus souvent des consommateurs
réguliers que les ouvriers. Quant aux étudiants
de l’enseignement supérieur, ils ne sont pas plus
"accros" que les actifs de leur âge. "Le cannabis
est une réalité complexe. Des jeunes parviennent
à gérer leur consommation et à en sortir, tandis
que chez d’autres ce produit ne fait que
renforcer leurs difficultés", explique M. Costes.

Pour s’approvisionner, les usagers ont recours au
don (58,7 %), à l’achat auprès de proches ou de
dealers (36,8 %) et à l’autoculture (5 %), en
plein développement, y compris dans les zones
urbaines. Environ 200 000 personnes sont passées
à l’autoproduction, ce chiffre étant considéré
comme une "fourchette basse". Toujours plus
répandu, le cannabis est aussi de moins en moins
cher. Le prix moyen d’un gramme de résine a
baissé de 30 % en dix ans, pour atteindre
actuellement environ 4 euros.

Quant au gramme d’herbe, il coûte 5 euros et des
pousssières de centimes, contre 10 euros en 1996.
Selon une étude qualitative réalisée auprès
d’usagers réguliers, le budget mensuel consacré à
l’achat du cannabis en 2006 se situe entre 80 et
150 euros, sans compter l’achat du tabac.

Au total, le chiffre d’affaires annuel que
représente la vente de cannabis en France est
estimé, sur la base de données déclaratives, à
832 millions d’euros (dont la part la plus
importante est attribuable aux 15-24 ans). On
considère que le chiffre d’affaires du tabac
atteint 13,7 milliards d’euros TTC (14,2
milliards pour l’alcool). En prenant en compte
l’ensemble des dépenses supportées par la
collectivité (traitements, répression,
prévention, etc.), le coût social du cannabis
peut être estimé à 919 millions d’euros (dont
seulement 36,5 millions au titre de la
prévention, contre 523, 5 millions pour la
répression), soit 0,06 % du PIB, ou encore un peu
plus de 15 euros par habitant. Comparativement,
le coût social de l’alcool et celui du tabac
s’élevaient respectivement, en 2003, à 2,37 % et
3,05 % du PIB, soit 599 et 772 euros par habitant.

Cancers, maladies respiratoires, troubles
psychiatriques : les méfaits du cannabis sur la
santé peuvent être multiples "sans que les études
explicitent toujours à quels niveaux de
consommation ces risques sont susceptibles
d’apparaître", souligne l’OFDT. Les risques de
mort violente sont essentiellement liés aux
accidents de la circulation. Le nombre annuel de
victimes directement lié à une conduite sous
l’emprise du cannabis serait d’environ 230, sur
la base d’un total de 6 000 morts sur les routes.

L’ouvrage est disponible sur le site de l’OFDT : Télécharger le rapport
Télécharger le communiqué de presse

Télécharger les principaux faits et chiffres

Les produits surdosés sont rares

Le joint d’aujourd’hui est-il plus fort que celui
des années 1970 ? Cette question récurrente est
largement débattue dans plusieurs pays européens.
Mais les spécialistes disposent de peu de recul,
le phénomène de consommation du cannabis n’étant
véritablement étudié que depuis une quinzaine
d’années.

"Aucune description des évolutions des taux de
THC sur une période antérieure aux années 1990
n’est disponible en France", rappelle
l’Observatoire français des drogues et des
toxicomanies (OFDT). Le THC ou
tétrahydrocannabinol est la principale substance
responsable des effets psychoactifs du cannabis.
C’est donc la teneur en THC qui détermine le
potentiel psychotrope du produit.

D’après une enquête d’observation coordonnée par
l’OFDT, menée à partir de plusieurs centaines
d’échantillons de cannabis recueillis auprès
d’usagers en 2005, la teneur moyenne en THC des
résines et des herbes est de 10 %. Ce chiffre
"s’inscrit dans les moyennes observées dans les
autres pays de l’Union européenne", constate
l’OFDT.

L’enquête fait néanmoins apparaître une "grande
variabilité" des teneurs en THC, avec un maximum
à 54 % pour les résines et à 25 % pour les
herbes. Mais la part de ces produits fortement
dosés – plus de 20 % de THC – semble marginale.
Elle est estimée à 4,3 % (5,2 % pour l’herbe et
3,4 % pour la résine) sur le marché clandestin
français.

Ces résultats recoupent les données issues des
douanes et de la police, qui font remonter
l’apparition de produits fortement dosés à
l’année 1997. Parmi l’ensemble des saisies
réalisées en 2004, 2 % des échantillons
contenaient plus de 20 % de THC. Et les dosages
effectués entre 2000 et 2005, notamment par
l’Institut national de la police scientifique,
ont montré des teneurs moyennes d’environ 9 %
pour les résines et 7 % pour les herbes.

Seule exception au sein de l’Union européenne :
la Hollande, où la culture locale utilise des
procédés permettant d’obtenir des taux de THC de
plus en plus élevés. Proximité oblige, c’est
d’ailleurs dans la moitié nord de la France que
l’on trouve davantage de produits surdosés.

"La rumeur d’une explosion des teneurs en THC est
impossible à documenter en France", insiste
Jean-Michel Costes, directeur de l’OFDT. "Au
cours des cinq dernières années, on constate
plutôt une stabilité", ajoute-t-il. Non sans
reconnaître que, "exceptionnellement, des
accidents peuvent survenir".

Enfin, aucune substance psychotrope (hors
cannabinoïdes) ou aucun principe actif
médicamenteux n’ont été identifiés en France –
que ce soit dans les produits de saisies ou les
produits de consommation – dans des substances
cannabiques.

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